
Sans changer officiellement les taux, le gouvernement provoque une hausse implicite de la fiscalité successorale.
Le projet de loi de finances pour 2026 acte un gel des abattements et barèmes jusqu’en 2028 et la suppression progressive de certaines réductions spécifiques.
Résultat : une “hausse silencieuse” des droits de succession pour de nombreux foyers.
Un gel du barème qui ne dit pas son nom
Le Titre IV du projet de loi de finances 2026, consacré aux recettes de l’État et à la fiscalité du patrimoine, ne modifie pas les taux des droits de mutation à titre gratuit (successions et donations).
Mais il en modifie la mécanique réelle.
Le texte prévoit en effet de :
- Geler le barème des abattements jusqu’au 31 décembre 2028 ;
- Supprimer ou plafonner plusieurs réductions spécifiques jugées obsolètes ou inefficaces (handicap, démembrement, transmission en nue-propriété) ;
- Maintenir les taux progressifs mais sans aucune revalorisation annuelle.
Autrement dit, l’inflation continuera d’augmenter la valeur des biens, tandis que les seuils fiscaux resteront figés : une hausse déguisée des droits de succession.
Les abattements concernés
Le barème d’abattement applicable aux transmissions reste donc inchangé :
| Type de bénéficiaire | Abattement actuel | Situation 2026–2028 |
|---|---|---|
| Enfants et parents | 100 000 € | Gelé jusqu’en 2028 |
| Petits-enfants | 31 865 € | Gelé jusqu’en 2028 |
| Frères et sœurs | 15 932 € | Gelé jusqu’en 2028 |
| Neveux et nièces | 7 967 € | Gelé jusqu’en 2028 |
| Personnes handicapées | 159 325 € | Suppression progressive (réduction spécifique) |
Avec une inflation annuelle moyenne de 3 à 4 %, cela revient à réduire mécaniquement la valeur réelle de ces abattements de près de 10 à 15 % d’ici 2028.
Une hausse “invisible” mais bien réelle
Prenons un exemple concret :
En 2025, un bien immobilier évalué à 500 000 € transmis à un enfant bénéficiait d’un abattement de 100 000 €, soit 400 000 € imposables.
En 2028, le même bien, revalorisé à 550 000 € du fait de l’inflation, sera toujours soumis au même abattement de 100 000 €.
Résultat : 50 000 € supplémentaires taxés sans modification de la loi.
Selon les projections de la DGFIP, ce gel pourrait rapporter 1,2 milliard d’euros supplémentaires sur trois ans, sans aucun changement apparent de taux.
Fin de certaines réductions spécifiques
Le projet de loi supprime ou restreint plusieurs dispositifs ciblés qui réduisaient les droits à payer :
1. Réduction pour handicap
Jusqu’à présent, une personne handicapée bénéficiait d’une réduction spécifique de 159 325 € sur la part taxable.
Cette réduction sera progressivement supprimée d’ici 2028, remplacée par un crédit d’impôt forfaitaire à la transmission, beaucoup moins avantageux.
2. Réduction en cas de donation en nue-propriété
Le texte supprime la réduction proportionnelle accordée pour les donations de la nue-propriété, jugée “complexe et peu lisible”.
Cette mesure impactera directement les stratégies patrimoniales de transmission via démembrement (donation de la nue-propriété aux enfants tout en conservant l’usufruit).
Objectif affiché : simplifier, mais en pratique, cela alourdit la facture pour les transmissions immobilières.
Un impact fort sur le patrimoine immobilier
Les transmissions immobilières familiales seront les plus touchées :
- Les biens ayant pris de la valeur depuis 2015 (période de forte inflation immobilière) verront leur taxation augmenter,
- Les donations anticipées perdront une partie de leur intérêt fiscal,
- Les stratégies patrimoniales via SCI ou démembrement devront être revues.
Les notaires alertent déjà :
“Ce gel des abattements équivaut à une hausse de fiscalité de 10 à 15 % sur trois ans, sans que cela apparaisse dans les taux.”
(Source : Conseil supérieur du notariat – note d’octobre 2025)
Objectif budgétaire assumé
Dans son exposé des motifs (page 178), le gouvernement précise :
“La rationalisation des dépenses fiscales et la limitation des niches successorales permettent d’améliorer le rendement des droits de mutation tout en préservant l’équité intergénérationnelle.”
En clair : les droits de succession sont une recette stable et croissante, mobilisée pour compenser la baisse des impôts sur la production et les allègements d’énergie.
En résumé
| Mesure | Effet principal | Public concerné |
|---|---|---|
| Gel des abattements jusqu’en 2028 | Hausse implicite des droits | Tous les héritiers et donataires |
| Fin de la réduction handicap | Hausse ciblée | Personnes handicapées |
| Suppression réduction nue-propriété | Moins d’optimisation | Patrimoines immobiliers |
| Non-indexation sur inflation | Perte de 10 à 15 % de valeur réelle | Familles transmettant des biens moyens à élevés |
En clair
Le gouvernement n’augmente pas les taux, mais réduit les avantages.
Ce “gel technique” produit les mêmes effets qu’une hausse d’impôt :
les familles paieront plus cher pour transmettre le même bien.
Conseil MaFormationImmo :
- Si vous envisagez une donation immobilière, réalisez-la avant 2026 pour profiter du barème actuel.
- Envisagez des transmissions échelonnées ou un démembrement temporaire avant la disparition des réductions spécifiques.




