
Un troisième trimestre en demi-teinte
Le troisième trimestre 2025 confirme une tendance déjà perceptible depuis le début de l’année : le marché de l’investissement n’a pas tenu toutes ses promesses.
Entre attentisme des investisseurs, taux d’intérêt encore élevés et visibilité économique réduite, les volumes placés se situent nettement en deçà des attentes, dans l’immobilier comme dans d’autres classes d’actifs.
Selon les chiffres Immostat, les volumes investis en immobilier d’entreprise reculent de près de 20 % par rapport à la moyenne décennale, et les transactions dépassant 50 millions d’euros sont de plus en plus rares. Le marché reste actif, mais sélectif.
1. Des anticipations trop optimistes
Les investisseurs tablaient sur un rebond plus marqué au second semestre, porté par une détente monétaire et un retour de la confiance.
Or, la BCE n’a que partiellement assoupli sa politique, et les conditions de financement demeurent tendues.
Résultat : les hypothèses de départ — souvent fondées sur une reprise des volumes de 10 à 15 % — ne se sont pas concrétisées.
L’erreur classique : confondre amélioration de la perception du risque et amélioration des conditions réelles d’investissement.
Les marchés se normalisent, mais pas assez vite pour justifier un retour massif des capitaux.
2. Des conditions de financement toujours contraignantes
Malgré une baisse progressive des taux directeurs, le coût du crédit reste élevé. Les banques exigent davantage d’apport, de garanties et de solidité locative.
Cette prudence réduit mécaniquement le nombre d’opérations finançables.
Dans l’immobilier notamment, le taux de rendement exigé (yield) reste supérieur à la rentabilité espérée des projets récents, freinant les décisions.
“Les investisseurs préfèrent temporiser plutôt que d’acheter trop tôt sur un marché dont les valorisations ne sont pas encore stabilisées”, résume un analyste chez CBRE.
3. Des arbitrages sectoriels et géographiques
La recherche de rendement sécurisé conduit les investisseurs à réallouer une partie de leurs capitaux vers :
- des actifs défensifs (logistique, santé, résidentiel géré),
- des marchés plus liquides (Allemagne, Espagne, pays nordiques),
- ou encore des fonds monétaires à rendement immédiat.
Cette redistribution réduit temporairement le flux vers la France et l’immobilier de bureaux, notamment en Île-de-France où les volumes placés chutent de 18 % par rapport à la moyenne décennale.
4. Le décalage entre intention et exécution
Autre facteur sous-estimé : le retard dans l’exécution des décisions d’investissement.
Les comités d’engagement rallongent leurs processus de validation. Les audits de durabilité (ESG), les analyses de risque locatif et les contraintes réglementaires allongent les délais de closing.
De nombreux investisseurs institutionnels affichent une volonté d’achat, mais les transactions se concluent plus tard, parfois reportées au T4 2025 ou début 2026.
5. Une prudence nourrie par la géopolitique et la fiscalité
Les tensions internationales, les élections américaines et les incertitudes fiscales (notamment autour de la réforme de la fiscalité immobilière et des régimes d’amortissement) nourrissent une attitude de prudence.
Certains investisseurs étrangers attendent une meilleure visibilité avant de revenir massivement sur le marché français.
En conclusion : le marché s’ajuste, pas se contracte
L’écart entre les volumes placés et les attentes des investisseurs ne traduit pas une crise, mais une phase d’ajustement.
Les capitaux existent, les investisseurs sont présents, mais ils privilégient :
- des actifs de qualité, durables, et bien situés,
- une sélectivité accrue,
- et des conditions de financement sécurisées.
L’enjeu des prochains mois sera de réconcilier les prix de marché et les attentes de rendement, pour que les volumes retrouvent progressivement leur niveau de croisière.
À retenir
- Les attentes du marché ont été surestimées.
- Le financement reste la clé de blocage principale.
- Les investisseurs ne fuient pas le marché, ils temporisent.
- Les actifs « core » et ESG conservent un fort attrait.




