Colocation vs Coliving : deux modèles, deux logiques

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Colocation : la mutualisation de l’existant

La colocation est un modèle désormais bien connu : plusieurs personnes partagent un même logement, au prorata des espaces, avec des chambres privées et des espaces communs. Elle repose sur la mutualisation des charges — loyer, eau, électricité, internet — ce qui rend chaque part plus abordable que le logement individuel. Ce mode de location optimise la rentabilité locative lorsqu’un propriétaire divise un grand bien (T4, T5, etc.) en chambres indépendantes ou semi-indépendantes. La vacance locative est réduite : même si une chambre est libre, les autres génèrent du revenu. Le risque locatif est mutualisé : un défaut de paiement d’un colocataire est souvent compensé par les autres. Enfin, les frais d’entretien et de gestion sont partagés, ce qui stabilise le coût global.

Cependant, la colocation classique présente aussi ses limites. Le turn-over des locataires est souvent élevé et peut engendrer des périodes de vacance. La dynamique communautaire n’est pas toujours naturelle ni durable. Et les contraintes de gestion — réparations, différends entre occupants — peuvent alourdir la tâche du bailleur ou du gestionnaire.

Coliving : redéfinir l’expérience résidentielle

Le coliving pousse plus loin l’idée de vie partagée, en structurant l’habitat autour d’une expérience. Il combine des unités privatives (chambres ou mini-studios meublés), des espaces communs (cuisine, coworking, salle de sport, rooftop, jardin partagé) et des services mutualisés comme le ménage, la blanchisserie, la conciergerie ou encore l’animation communautaire. Ce modèle s’apparente à une version « clé en main » de la colocation, avec un positionnement plus qualitatif et une gestion professionnelle.

En 2024, la France comptait plus de 8 300 places de coliving, pour un total d’environ 455 millions d’euros d’investissements selon Compose. Le taux d’occupation dépasse souvent 90 % dans les grandes métropoles, et les rendements oscillent entre 5 et 6 % pour les projets bien structurés. Le coliving attire principalement les jeunes actifs, freelances et étudiants internationaux, mais séduit de plus en plus les personnes en transition — reconversion, mobilité professionnelle ou retour d’expatriation.

Cette expansion rapide suscite néanmoins des critiques. Le coût du logement par occupant est souvent 20 à 30 % supérieur à celui d’une colocation traditionnelle, justifié par les services et la flexibilité offerts. Dans certaines villes, le coliving échappe à l’encadrement des loyers, créant un flou juridique et des effets inflationnistes. Des dérives sont également constatées lorsque des immeubles entiers sont convertis en logements à rentabilité maximale, au détriment du tissu résidentiel local. Enfin, la réussite du coliving repose sur une gouvernance forte : sans gestion humaine ni cohésion communautaire, le modèle perd sa substance.


Une évolution sociétale majeure : habiter autrement

La montée simultanée de la colocation et du coliving ne s’explique pas seulement par des logiques économiques. Elle traduit une évolution profonde de notre rapport au logement et au collectif.

La mobilité professionnelle et la fragmentation des parcours de vie incitent à privilégier des solutions flexibles, réversibles et temporaires. La crise du logement accentue ce phénomène : dans les métropoles où le foncier se raréfie, mutualiser les espaces devient une nécessité. Parallèlement, le besoin de lien social — après plusieurs années marquées par l’isolement urbain et la généralisation du télétravail — pousse de nombreux résidents à rechercher un habitat porteur de sens, favorisant les rencontres et les projets communs.

Les nouvelles générations, en particulier les millennials et la génération Z, privilégient l’usage sur la propriété. Leur rapport à l’habitat est fonctionnel, écologique et expérientiel : ils veulent habiter des lieux vivants, connectés et adaptés à leur rythme.


Le rôle transformé du professionnel de l’immobilier

Dans ce contexte, le professionnel de l’immobilier n’est plus un simple bailleur ou intermédiaire. Il devient concepteur, accompagnateur et garant d’un projet de vie partagée. Cette mutation exige de nouvelles compétences.

Sur le plan architectural, il doit savoir repenser les espaces : optimiser les volumes, valoriser la lumière, créer des lieux de convivialité et de travail communs, tout en préservant l’intimité de chacun. Les matériaux doivent être durables, faciles à entretenir et compatibles avec la domotique moderne.

Sur le plan juridique et fiscal, la complexité des baux — meublés, mobilité, hybrides — demande une rigueur accrue. Les services inclus, la mutualisation des charges et la conformité réglementaire (urbanisme, sécurité, encadrement des loyers) nécessitent une ingénierie contractuelle précise.

Sur le plan opérationnel, le gestionnaire doit savoir animer la communauté. Organiser la vie quotidienne, réguler les conflits, planifier les services, maintenir la cohésion sociale sont devenus des missions centrales. L’outil numérique devient un allié : applications internes, plateformes de réservation, tableaux de bord communautaires, outils de gouvernance participative.

Le marketing immobilier se transforme également. Le discours n’est plus centré sur le bien, mais sur la promesse de vie : une expérience, une ambiance, une communauté. Le professionnel devient un « storyteller » de l’habitat, mettant en avant des valeurs, des profils et des histoires.

Enfin, la rentabilité reste un enjeu majeur. Le pilotage financier d’un projet de colocation ou de coliving implique une maîtrise fine des charges, de la densité d’occupation et des marges de service. La rentabilité n’est plus seulement locative, elle est aussi relationnelle : fidéliser les résidents, réduire le turn-over, créer de la valeur d’usage et du bouche-à-oreille positif.


Vers un modèle hybride et responsable

La frontière entre colocation et coliving tend à s’estomper. De nombreux projets hybrides apparaissent : colocation premium avec services, coliving intergénérationnel, habitat participatif ou solidaire. Tous répondent à une même aspiration : réinventer le vivre-ensemble.

Mais cette transformation doit rester mesurée. L’habitat partagé ne doit pas devenir une bulle spéculative ni une réponse élitiste à la crise du logement. Il doit s’ancrer dans une vision durable, inclusive et locale, capable d’intégrer les territoires et leurs spécificités.

À terme, c’est une philosophie de l’habitat qui s’impose : plus flexible, plus connectée, mais aussi plus humaine. La colocation optimise la rentabilité locative grâce à la mutualisation. Le coliving valorise l’expérience résidentielle et la fidélisation. Ensemble, ils traduisent une mutation sociétale majeure : vivre ensemble autrement.

Et désormais, le rôle du professionnel de l’immobilier ne consiste plus à simplement louer, mais à concevoir, accompagner et sécuriser des projets de vie partagée.

Fruit d’une collaboration inédite entre l’homme et la machine, cet article a été conçu pour vous offrir une information précise et pertinente.

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